Cérémonie de remise du doctorat Honoris
Causa
de l’Université P. Sabatier á
Richard N. Zare
Juin 2003
Richard N. Zare est né a Cleveland Ohio, en
Novembre 1939. 11 a obtenu son BA de l’Université de Harvard en
1961, et après avoir travaillé à l’Université
de Berkeley de 61 a 63, il passe son doctorat a Harvard en 1964. Durant les
annees 64—69, au JILA et a l’université du Colorado, il
passe d’un statut de stagiaire post—doctoral à celui
professeur associé.
C’est en 1969 qu’il devient professeur a
l’université Columbia, à New York et en 1977 qu’il
deviendra professeur a l’université de Stanford. Sa discipline est
la chimie, mais a la limite de la physique et même de
l’astrophysique à
Boulder, R. N Zare a été rattaché à fois à ces trois
départements. Et ses travaux les plus récents ont des
applications en biologie!
Je vais essayer de décnre briévement la
carrière de recherche de R. N Zare je pourrais la résumer en
disant qu’il a publié environ 600 articles dans des revues
scientifiques, déposé 100 brevets, reçu une cinquantaine
de distinctions et de prix scientifiques, qu’il est aussi un enseignant
passionne’ et un pédagogue exceptionnel. . . mais, malgré
le peu de temps qui m’est accordé, je vais essayer de vous en dire
un peu plus sur cette carrière!
Tout au long de sa carrière,
commenée peu aprés
1960, R. N Zare a su marier de maniére remarquable la physique
moléculaire et le laser, qui venait d’apparaÎître et
se développait tre’s rapidement.
Les moléculcs sont (beaucoup) plus complexes
que les atomes. Vers 1960, les techniques subtiles (cxpérienecs de Rabi,
pompage optique inventé par A. Kastler et J. Brossel), qui avaient
permis une explosion d’cxpéricnccs et de connaissances nouvelles
sur les atomes, s’appliquaicnt difficilement aux moléculcs. Celles-ci
restaient le sujet d’expériences
“traditionnelles”: le laser, par ses
performances d’une extrême variété, va permettre une
révolution analogue sur les atomes et sur les molc’cules ! Dans
cette rc’volution qui n’est probablement pas encore achevée
aujourd’hui, R. N. Zare a constamment joué un role de pionnier.
Un de ses premiers articles, paru en 1966 dans le Journal
of Chemical Physics et qui a joué
un rôle trés important, a consisté a proposer d’étendre aux petites moléculcs
les expériences d’effet Hanle l’effet Hanle, c’est la dépolarisation
induite par un champ magnétique, de la lumière de fluorescence, lumière
réémise par un petit système quantique préalablement
excité ... pourquoi vous donner tant de détails? parce que en
vous parlant de lumière de fluorescence et de polarisation lumineuse, je
vous ai cité deux des sujets de prédilections de R. N. Zare. La
polarisation lumineuse est intimement liée a l’échange de moment cinétique
entre la lumière et la matière et R. N. Zare est l’un des
meilleurs spécialistes de ce domaine, sur lequel il a écrit un
livre excellent!
Quant á la lumière de fluorescence excité
en irradiant une molécule par un laser, c’est un outil d’une
extraordinaire sensibilité pour détecter une molécule, non
seulement sa préscence, mais aussi dans quel état elle sc trouve,
Si elle vibre, Si elle tourne, autour de quelle direction moycnne, et bien des
choses plus subtiles encore ! R. N. Zare scra le premier á montrer en
1974 par un article paru dans la revue Science quc cette technique peut ouvrir
la voie á une gamme trés vaste d’expérienccs oú
on analyse un processus chimiquc par une détection sélective des
produits de cette réaction. Tout une école se créera, et
les expériences maintenant communes, en physique comme en biologie, de
detection par fluorescence laser de molecules uniques descendent de manicre assez
directe de ce mouvement initié alors par R. N. Zare!
Le décor est maintenant planté:
des molécules qui vont réagir
entre elles, ou aprés excitation par un laser se fragmenter, ou rebondir
sur des surfaces,
des lasers pour exciter les produits de
ces réactions
et bien sûr, R. N. Zare et ses élèves,
rapidement suivis par beaucoup d’autres chercheurs, qui observent et
interprètent ces expériences.
Mais la pièce n’est pas écrite...
et c’est une pièce aux cent actes divers ! En fait bien plus de
cent puisque, je vous l’ai dit, R. N. Zare a signé 600 articles
En qu~ques minutes, je ne peux en faire qu’un
survol trés rapide. En relisant la liste des titres de ces publications
(...excusez moi, mais je n’ai regardé que 400 d’entre eux ..
sélection hasardeuse des bases de données), j’ai noté
une caracte’ristique forte : R. N. Zare aborde un sujet par un premiére
experience souvent simple, voir naïve, et il le poursuit durant des années,
développant son savoir faire instrumental, complétant la théore
de l’expérience ou du processus, engage des collaborations, tire
de tout cela des idées de nouvelles expériences plus
sophistiquces, dont certaines sont de purs chefs-d’oeuvre, tout le
processus pouvant durer 15 ans, ou même plus!
D’autre part, les themes étonnent par
leur variété. Les voici rappelés de maniere à peu
prés chronologique:
• Etudes
trés fines d’états moleculaires excités, par pompage
optique
• Progrés
sur la cohérence de l’analyse des spectres mole culaires
• Etudes
de collisions d’atomes excités, avec des atomes puis des molécules;
réactions chimiluminescentes
• Détection
selective par laser de produits moléculaires de collisions chimiquement
réactives : produits de photodissociation, produits de collisions entre
jets moléculaires croisés, puis collisions entre une molécule
et un atome rapide produit par photodissociation d’un précurseur
moleculaire, produits de collision de molecules sur des surfaces ou de
recombinaison d’atomes sur des surfaces. Techniques de détection
selective par ionisation multiphotonique résonante (REMPI)
• Etudes
de molecules trés excitees (etats de Rydberg) et du processus de
photoinisation
• Etudes
des harmoniques de la liaison CH ou OH et de la réactivité spécifique
associée ou de 1’ isomérisation
• Autres
techniques de détection sensibles de molecules en phase gazeuse par
laser techniques d’optique non linéaire (mélange a 4
ondes), techniques d’absorption (photoacoustique ou CRDS) ; applications
de ces techniques
• Micro-analyse
de surfaces solides, utilisant deux impulsions laser (une pour vaporiser et
l’autre pour ioniser la vapeur, sans fragmenter les mole’cules) ;
technique de’veloppée et appliquée a l’analyse de météorites
(vie sur Mars ?)
• Detection
de molécules uniques ou en trés petites quantités en phase
dense par des techniques varlees : électrophorése capillaire,
fluorescence laser en microscopic confocale; applications a des problémes
de biologie. R. N. Zare nous en a parlé ce matin dans un séminaire.
C’est donc un scientifique á la carriere
d’une exceptionnelle richesse que nous recevons aujourd’hui comme
docteur Honoris Causa de l’Université Paul Sabatier. Cette
richesse, d’autres institutions l’ont reconnu avant nous. Ainsi R.
N. Zare a été élu á 37 ans membre de la
“National Academy of Science” des USA. Il a été
membre du “Board of the National Science Foundation” de 1992 a
1998, et il l’a préside’ de 1996 a 1998.
En conclusion, j’espére que R. N. Zare
est heureux de cette ceremonie en son honneur. Personnellement, je crois que
c’est notre université qui est honoree de recevoir la visite
d’un scientifique de sa qualité et de sa réputation!